Maniaco dépressif

 

Publié le 11 novembre, 2024 par Marion Boisselière

Le trouble bipolaire, ou maladie bipolaire, ou encore maladie maniaco-dépressive touche environ 3 % de la population, soit presque 2 millions de Français.

Cette maladie se manifeste par des périodes d’exaltation et d’excitation, suivies de périodes d’effondrement et de dépression. Les différents types de dépression incluent celles qui surviennent dans le cadre du trouble bipolaire, avec des épisodes pouvant durer plusieurs mois. Entre deux séquences, il y a des périodes stables, dites de « rémission ». Le diagnostic de cette maladie peut prendre des années avant d’être posé. Il faut nécessairement la survenue d’une phase maniaque pour pouvoir diagnostiquer un trouble bipolaire. Il existe plusieurs degrés dans la maladie : le trouble bipolaire de type 1 (psychose maniaco dépressive), le trouble bipolaire de type 2 (sans symptômes psychotiques) avec une manie ou une hypomanie ou encore un « état mixte ».

L’origine de la maladie bipolaire dépend de trois facteurs : génétique, psychologique et environnemental. Le trouble bipolaire apparaît uniquement si ces trois facteurs sont réunis.

Cette maladie a deux angles de traitement. Pour répondre au désordre biologique, il existe des traitements médicamenteux. Pour faire face à la fragilité psychologique la réponse est psychothérapeutique : suivi psychiatrique et psychologique, et également la psychoéducation.

Maniaco dépressif ou trouble bipolaire, c’est quoi ?

Auparavant les psychiatres employaient la terminologie de psychose maniaco dépressive. Puis cette dénomination a été abandonnée : cette affection porte désormais le nom de trouble bipolaire.

Cette maladie se caractérise par une variation de l’humeur pathologique. Tout le monde est sujet à ressentir des hauts et des bas, des « jours avec » des « jours sans ». Le moral fluctue, parfois en fonction du contexte de vie (période difficile niveau professionnel, affectif, social), et parfois nous ne trouvons pas d’explications à ces sautes d’humeur. Cette fluctuation d’humeur devient une pathologie lorsque ces réactions sont très exacerbées et prennent une ampleur extrême.

En périodes difficiles, la personne maniaco dépressive est submergée de tristesse et de désespoir : c’est la dépression, le « pôle noir ». Cette phase dépressive peut durer des mois.

Puis en opposition, le personne peut traverser une période où elle se sent submergée d’euphorie et d’excitation. Durant cette phase, les pensées, les projets et les actions s’accélèrent à toute vitesse : c’est l’exaltation, le « pôle opposé ». Cette phase de manie ou d’hypomanie peut avoir des répercussions relationnelles et financières dommageables.

Entre les crises dépressives et les crises maniaques, de nombreux patients retrouvent une humeur équilibrée et peuvent reprendre le cours de leurs activités habituelles et être performants. Ils sont en capacité de faire face aux exigences de la société. On parle de « période de rémission ».

Pour d’autres patients, ce retour « à la normale » n’est pas exactement possible. Cela dépend de l’intensité et des conséquences des phases dépressives ou maniaques. Cela dépend également de la capacité d’adaptation et de « digestion psychologique » du patient. Les phases de crises du trouble bipolaire (dépression et manie) sont traumatiques. Imaginons… Après avoir passé une longue période dans la douleur morale avec fatigue, renoncement et isolement, cela peut être complexe de s’en sortir indemne. La dépression crée un traumatisme interne. Par ailleurs, il peut être difficile d’assumer les conséquences de ses comportements durant la phase de manie (perte d’emploi, endettement, infidélités, etc.). Ces traumatismes internes et ces vécus génèrent douleur morales, angoisses et un sentiment d’incapacité à se contrôler.

Ainsi, on perçoit que le trouble bipolaire peut avoir des degrés d’intensité variable :

  • trouble bipolaire de type 1 (TB1) : les phases de dépression sont très profondes et les phases de manie sont très délirantes, « bruyantes ». Les symptômes sont psychotiques, d’où l’ancienne appellation « psychose maniaco dépressive ». Auparavant, les psychiatres ne considéraient que cette forme clinique. Mais depuis, la psychiatrie a intégré dans le cadre de cette maladie, des formes dites « atténuées ». La terminologie psychose maniaco dépressive n’était donc plus adaptée pour désigner l’ensemble des formes cliniques.
  • trouble bipolaire de type 2 (TB2) : les phases de dépression sont tout aussi intenses, mais les phases de manie sont moins fortes. On parlera d’hypomanie pour qualifier ces « petites manies ». Dans cette forme de bipolarité, il n’y a pas de symptôme psychotique.
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Trouble bipolaire de type 2 : un diagnostic difficile

Le trouble bipolaire de type 2 est beaucoup plus difficile à identifier et donc à diagnostiquer. Il peut se passer une dizaine d’années avant que le diagnostic soit posé. La non prise en charge de son trouble génère une longue période d’errance pour le malade ainsi qu’une accumulation de conséquences néfastes dans sa vie affective, sociale et professionnelle.

Par ailleurs, cette difficulté d’identifier un trouble bipolaire de type 2 peut engendrer confusion et erreur de diagnostic par les psychiatres, ce qui est tout aussi dangereux. En effet, selon une étude récente, il existe un surdiagnostic de certains troubles mentaux (troubles bipolaires, trouble de l’attention et hyperactivité, etc.). D’autre part, détecter les symptômes d’un trouble bipolaire de type 2 peut s’avérer complexe. Plusieurs troubles et caractéristiques psychiques ont des symptômes ou caractéristiques d’apparences similaires, notamment : cyclothymie, dépression unipolaire, dysthymie, borderline ou trouble de la personnalité limite (TPL), symptômes des suites de stress post traumatique (SPT), haut potentiel intellectuel (HPI), haut potentiel émotionnel (HPE), hypersensibles, etc. Les nuances peuvent être subtiles : confusion et erreurs de diagnostic ne sont pas rares, et conduisent à des prescriptions de molécules chimiques inadaptées, voire contre productives.

Le trouble bipolaire est fréquemment associé à d’autres troubles du comportement : problèmes d’addiction (stupéfiant, alcool, etc.), troubles anxieux, alimentaires, etc. Ce cumul provoque une souffrance plus importante. Les deux tiers des personnes bipolaires ont des problèmes de dépendance. Le plus souvent il s’agit de l’alcool et du cannabis, ces deux substances favorisant la « fuite en avant ». Et c’est un cercle vicieux qui s’installe car la consommation de ces substances aggrave le trouble bipolaire.

Les personnes atteintes de bipolarité peuvent se montrer insensibles aux attentions, à l’empathie et à l’amour de leurs proches. Ces fluctuations d’humeur sont susceptibles de créer une véritable difficulté au niveau des modalités relationnelles du malade. Les proches peuvent ressentir un sentiment d’impuissance, ce qui est vecteur de frustration. Progressivement, cette frustration peut générer de l’angoisse, puis de l’agressivité, du rejet vis-à-vis du malade.

La dépression dans le trouble bipolaire

La dépression est une rupture dans le fonctionnement habituel de la personne. Il peut être brutal ou très progressif et insidieux. Dans ce deuxième cas, le patient n’identifie pas qu’un dysfonctionnement s’infiltre sournoisement dans son être, les difficultés s’amplifient jusqu’à le paralyser totalement. Le patient se retrouve alors dans un état affectif douloureux, mêlé de peurs et de pensées négatives envahissantes. Sa perception de « son monde » change comme si tout devenait gris : son comportement bascule dans la prostration, l’irritabilité, la culpabilité, l’auto-dévalorisation.

Quels sont les symptômes de la phase de dépression ?

Bien que la dépression puisse prendre plusieurs formes d’expression, on retrouve des caractéristiques constantes. Voici les symptômes le plus souvent observés :

  • une profonde tristesse : elle apparaît dès le réveil jusqu’à l’endormissement. Cette tristesse n’est pas en rapport avec l’environnement, et rien ne parvient à l’adoucir.
  • un fort sentiment de culpabilité : le dépressif se sent mal d’être « comme ça », coupable de son comportement, alors il s’auto-dévalorise voire s’auto-accuse.
  • un affaiblissement affectif : les sentiments du dépressif sont comme anesthésiés, il ne ressent plus d’amour à l’égard de ceux qu’il aime, et ce même en faisant des efforts.

  • une perte de sensibilité au plaisir (anhédonie) : le dépressif perd sa capacité à ressentir quelque chose d’agréable ou du plaisir.
  • un isolement : afin de protéger ses relations professionnelles et personnelles, le malade se replie jusqu’à l’isolement total. Les relations sociales deviennent pénibles : parler, écouter et faire bonne figure génère de sa part un gros effort, puis déplaisir, ennui et lassitude.
  • un épuisement (asthénie) : le dépressif ressent une fatigue générale qu’il ne parvient pas à réguler, même en dormant. Cela s’accompagne d’un ralentissement des pensées et des mouvements.
  • une anomalie du sommeil : l’hypersomnie ou l’insomnie. Le dépressif sujet à l’hypersomnie se couche et peine à se lever, il n’a qu’une seule envie, retourner se glisser sous sa couette pour l’essentiel de sa journée. Le dépressif sujet à l’insomnie peine à s’endormir et a des réveils nocturnes. Il est envahi de ruminations et d’idées noires.
  • des angoisses omniprésentes : le dépressif est submergé de pensées angoissantes, il ressasse de façon obsessionnelle. L’angoisse est un mal puissant et destructeur. Lorsqu’elle atteint son paroxysme, elle peut être à l’origine d’idées autodestructrices ou même d’un passage à l’acte suicidaire.
  • un appétit augmenté ou diminué : hyperphagie ou anorexie.

  • des troubles cognitifs : les capacités de mémoire, de concentration et d’attention sont nettement amoindries.

  • la procrastination : le dépressif a tendance à repousser ce qu’il veut faire au lendemain. Il se traîne, la moindre chose à faire lui est coûteuse, comme se laver, s’habiller, etc.

On peut également retrouver d’autres symptômes : une frilosité importante, une tendance à suer davantage, un engourdissement des membres, une sensation de lourdeur dans le corps, une accélération du rythme cardiaque, une recherche de la luminosité ou à l’inverse une fuite de la lumière.

Dans le cas d’un trouble bipolaire de type 1, il y a des symptômes psychotiques, à savoir la présence de délire.

Dépression : les effets sur le malade

Le patient dépressif ressent une double souffrance, ce qui peut lui donner l’impression d’être dans un cercle vicieux. Il y a la souffrance qui prend son origine directement de la maladie. Et il y a la souffrance consécutive aux jugements que porte le malade sur lui-même, ce qui vient alourdir la symptomatologie.

Dans la dépression bipolaire, le patient n’a plus d’« énergie vitale » : il « ne peut pas » se lever, se laver et s’habiller, il « ne peut plus » lire, se concentrer, fixer son attention, suivre une conversation. Une personne dépressive est comme un moteur sans essence. La dépression envahit le mental, fragilise le physique, mine le quotidien et met à mal la vie relationnelle.

Le soin de la dépression chronique est un très long parcours jalonné par des périodes de doutes, de désespoir, parfois du rejet de la prise en charge médicale.

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Manie et hypomanie

Le terme « manie » vient du grec et signifie littéralement « rendre furieux ». C’est la phase dite « haute » du trouble bipolaire générant des états d’exaltation variables en fonction de son intensité. La manie est facilement diagnostiquée car elle est très intense. La phase maniaque peut être bien plus destructrice que la phase dépressive. L’hypomanie est plus légère, c’est une forme atténuée de la manie, elle est complexe à diagnostiquer. La phase maniaque ou hypomaniaque peut durer quelques mois.

Pour pouvoir identifier une hypomanie, il faut déjà parvenir à cerner le comportement et fonctionnement habituel de la personne, soit son « rythme de croisière ». Puis il faut être capable d’observer sur plusieurs jours une hausse de régime, c’est-à-dire que le fonctionnement de la personne est au-dessus de cette allure de croisière. A partir de cette observation, il y a une suspicion d’hypomanie. Pour affiner le possible diagnostic, le psychiatre aborde une série de questions sur les comportements et les ressentis du patient. Puis il creuse sur les antécédents familiaux, sur la réaction du patient aux antidépresseurs lors de phases dépressives passées. Il demeure néanmoins une part de subjectivité. Dans de rares cas, le psychiatre peut faire passer des tests psychométriques pour écarter cette subjectivité.

La manie peut se superposer ou se mélanger aux symptômes dépressifs, dans ces cas, on parle d’« états mixtes ». La manie, l’hypomanie ou l’« état mixte » signent le diagnostic du trouble bipolaire. Tant qu’il n’y a pas eu d’épisode maniaque ou hypomaniaque ou d’état mixte, le patient ne présente alors que des dépressions, soit un trouble monopolaire. Un diagnostic peut changer, il ne vaut qu’au moment où il est porté.

Des médicaments permettent d’atténuer la symptomatologie du patient lorsqu’il est agité, qu’il soit en manie, en hypomanie ou en état mixte. Ces médicaments freinent l’agitation du malade afin d’éviter le passage à l’acte (extravagant ou suicidaire). Les médicaments ne peuvent pas « cibler » les seuls symptômes maniaques, ils provoquent un ralentissement général chez le malade.

Épisodes maniaques, phases hypomaniaques : les symptômes

La phase maniaque est une période d’exaltation où le patient est envahi émotionnellement, il s’emballe et ressent une puissance formidable, il est « en extase ». Il devient explosif et peut mettre en danger ses relations familiales et sociales.

Voici les signes de la phase maniaque et hypomaniaque :

  • une labilité de l’humeur : l’humeur du patient est instable et influencée par une hyperréactivité émotionnelle et une hypersensibilité.

  • une hyperréactivité émotionnelle : les émotions du patient sont extrêmement amplifiées, il peut interagir de façon brutale, inattendue et disproportionnée. Il peut rire aux éclats, faire preuve de beaucoup d’humour mais souvent de façon excessive ou inappropriée. Il peut devenir odieux, injurieux, grotesque.

  • une hypersensibilité à l’ambiance environnante  (hypersyntonie au contexte environnemental) : ce qui joue sur la fluctuation de l’humeur qui change de façon brutale et fréquente.

  • une grande distractibilité : les idées se coupent à la moindre distraction (sonore, visuelle, etc.)

  • une accélération des pensées (tachypsychie) : l’esprit du patient va vite, les idées fuient dès qu’elles arrivent, il se met à faire de la logorrhée (augmentation des paroles, du flux verbal). Les pensées se « bousculent au portillon », le discours n’a plus de fil conducteur et devient incompréhensible, incohérent.

  • une désinhibition : la personne est énergique et joviale, elle développe des capacités de rencontre et de sociabilisation exceptionnelles. Il y a un sentiment d’extase, jouissif, un sentiment d’optimisme aveugle, de toute puissance. La libido est augmentée, les sens sont en hyper-éveil. La personne ne se censure plus et laisse libre cours à toutes ses pulsions, parfois incompatibles avec l’environnement social habituel : c’est le passage à l’acte des pulsions sexuelles et des pulsions d’agressivité.

  • un excès de consommation de substances nocives : alcool, cannabis, cocaïne, etc. Cela aggrave la désinhibition de la phase maniaque et le passage à l’acte.

  • un sentiment de toute puissance : lorsque la phase maniaque ou hypomaniaque monte et qu’elle est modérée, le patient est euphorique, il peut être un véritable boute-en-train, un leader. Il peut abattre une quantité de travail impressionnante, être efficace, inventif, hypermnésique (grande capacité de mémoire) et développer une sorte d’intelligence connective très créative. Les nuits sont courtes et les réveils faciles. Le patient a un sentiment d’invincibilité, de confiance en soi démesurée, ce qui peut induire des comportements extravagants et dangereux, pour soi et pour les proches. Puis, lorsque la phase maniaque ou hypomaniaque s’intensifie, un désordre et une inconstance s’installent et les fonctions cognitives s’altèrent (trouble de l’attention, de la concentration et de la mémoire). A ce stade, les erreurs et les comportements à risques se multiplient, « erreurs » qu’il sera difficile d’assumer en phase dépressive.

La manie est la seule maladie capable de « rendre heureux ». De nombreux patients peuvent garder une nostalgie de ces périodes maniaques ou hypomaniaques. Cela rend le traitement de la maladie complexe car le patient se voyant privé de ces sensations de plaisir parfois immense, peut trouver sa vie « monotone » sous médication.

Trouble bipolaire : les « états mixtes »

L’« état mixte » est une forme d’expression de la maladie bipolaire. Il concerne plus d’un quart des cas. A ce jour, six sous-types d’états mixtes sont identifiés. Il se caractérise par un mélange ou une superposition des symptômes dépressifs et des symptômes maniaques. C’est l’expression de la maladie la plus préoccupante car il y a un risque très important de passage à l’acte d’un suicide réussi.

En effet, dans le cas d’une superposition des symptômes, le patient est assiégé par une souffrance profondément douloureuse (symptôme dépressif), associée d’une désinhibition et d’une agitation majeure (symptôme maniaque).

Dans le cas de mélange des symptômes, ou plus précisément d’une alternance des deux à un rythme très rapide, le patient passe du rire aux larmes en quelques secondes, un rythme épuisant et insupportable. C’est particulièrement déroutant pour l’entourage. La malade ressent une accélération des pensées (tachypsychie), une hypersensibilité à l’ambiance environnante  (hypersyntonie au contexte environnemental) et une grande distractibilité. Ses pensées fusent et se coupent à la moindre distraction, au moindre « grain de sable » ayant touché son hypersensibilité. Les variations d’humeur sont donc brutales, incessantes, imprévisibles, incontrôlables.

L’état mixte nécessite une prise en charge rapide et soutenue. Le patient peut rester chez lui avec un suivi psychiatrique très soutenu uniquement s’il bénéficie d’un entourage proche solide, attentif, et capable de le protéger. Sinon, le patient doit être hospitalisé.

Origines et Causes des troubles bipolaires

L’origine de cette maladie est multifactorielle. Trois grands domaines doivent être pris en considération : la biologie, la psychologie et les événements de la vie. Il faut cumuler une fragilité dans ces trois dimensions pour déclarer ce trouble, un ou deux ne suffisent pas. Certains pensent à tort qu’un événement à lui seul peut déclencher la maladie. Or, il faut avoir le « tiercé perdant », à savoir : un problème biologique ou génétique, une personnalité fragile et des événements de vie importants.

Tout est relié. La vie psychique émane du cerveau. Le psychisme est déterminé par le fonctionnement des neurones qui en sont les chefs d’orchestre. Par conséquent, on comprend que les gènes agissent sur le comportement, et que notre comportement agit sur notre environnement. Et bien sûr, notre environnement (les apprentissages, l’éducation, l’environnement affectif, etc.) agissent sur nos comportements et sur notre psychisme, c’est le processus de neuroplasticité.

La dimension biologique ou génétique de la bipolarité

Le trouble bipolaire n’est pas une maladie endogène, où seule la biologie entrerait en ligne de compte. Pour que la maladie s’exprime, il faut qu’une vulnérabilité génétique rencontre certains facteurs psychologiques et environnementaux. Faisons un petit point bio-génétique pour mieux comprendre comment ces trois facteurs sont reliés.

L’ADN se crée lors de l’union d’un spermatozoïde et d’un ovule. Ce code ADN se transmet dans le noyau de chaque cellule du corps. C’est ce système ADN qui permet d’orchestrer le développement et le fonctionnement de la personne. L’ADN porte les gènes, donc toutes les cellules ont les mêmes gènes.

Les cellules du cerveau sont les neurones. Ils sont environ cent milliards et seule une petite partie est impliquée dans la régulation de l’humeur et du moral de la personne. Les neurones se connectent entre eux à l’aide de molécules chimiques.

Les neurones impliqués dans la régulation de l’humeur se situent dans le système limbique du cerveau, soit dans la partie antérieure et centrale. C’est l’ADN de ces neurones-ci qui commande la fabrication de molécules chimiques jouant des rôles essentiels dans la régulation du moral. On appelle ces molécules chimiques les monoamines. Ces monoamines sont au nombre de trois : la dopamine, la noradrénaline et la sérotonine. Pour faire simple, le moral dépend de l’action conjuguée de ces molécules monoamines et d’une multitude d’autres molécules qui les entourent.

Il se peut que l’ADN des neurones du système limbique d’une personne présente une vulnérabilité. Alors s’il y a une agression, la fragilité de ce centre de commande va devenir instable et il ne pourra plus donner des ordres de commande « parfaits » aux molécules monoamines et celles qui l’entourent. Ainsi, ces gènes « chef d’orchestre » ne remplissent plus leur fonction parfaitement, ce qui cause un déséquilibre dans la production des molécules responsables de la régulation du moral : cela provoque un dérèglement de l’humeur.

Cette vulnérabilité génétique est possiblement transmissible des parents aux enfants. Selon une étude, pour un ascendant présentant un trouble bipolaire de type 1, ses descendants ont 90 % de chances de ne pas être malades. A ce jour, il n’y a pas de chiffre pour le trouble bipolaire de type 2, les études portent principalement sur le type 1.

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La dimension psychologique et environnementale du trouble bipolaire

L’océan du psychisme est le résultat de milliards de neurones connectés entre eux.

La dimension psychologique, c’est la personnalité de l’individu. Plus précisément c’est sa capacité à « faire face » aux stress. Depuis la naissance, chacun fait face à des expériences stressantes qu’il intègre psychiquement et développe des réponses émotionnelles : des réactions, des actions, des pensées. Cette séquence « facteur de stress – intégration psychique – réponse émotionnelle » influence, conditionne, constitue la personnalité de l’individu, son psychisme. (notamment ses mécanismes de défenses).

Ces capacités à « faire face » amortissent ou amplifient l’impact des événements de vie sur l’individu. Le fait d’avoir vécu une enfance difficile ne présage pas de devenir un adulte fragile psychiquement. A contrario, une enfance tranquille n’assure pas d’être un adulte solide sur le plan psychique.

Un bébé arrive au monde avec une personnalité de base déterminée par son terrain génétique. Sa personnalité va subir des modifications au gré de son histoire et de ses expériences de vie. Ceci va conditionner en partie l’impact que peuvent avoir les événements traumatisants sur son terrain génétique. En fonction de sa capacité à « faire face », cette personnalité peut protéger son matériel génétique et éviter qu’une zone de vulnérabilité se révèle ; ou à l’inverse, accentuer l’impact de l’événement et participer à l’expression de cette vulnérabilité.

Par exemple, une personne peut présenter une vulnérabilité génétique avec un trouble bipolaire en sommeil, sans que la maladie ne se déclare ; ceci à condition que son psychisme (sa personnalité) ait une capacité efficace à « faire face » aux événements stressants et traumatisants. Mais si cette même personne a un psychisme qui filtre mal ses événements de vie : le matériel génétique ne sera pas protégé et le trouble bipolaire en sommeil va se réveiller. Il s’ensuit alors un déséquilibre dans le cerveau à l’origine des dépressions, des manies ou hypomanies. Le premier épisode de la maladie peut être dépressif ou maniaque. Si le premier épisode est dépressif, on ne peut pas à ce stade suspecter un trouble bipolaire.

Pour qu’un trouble bipolaire naisse, il faut la conjonction de trois facteurs :

  • la présence d’une vulnérabilité génétique (trouble bipolaire en sommeil)
  • une personnalité fragilisée par des traumatismes psychiques. La personne présente une sensibilité émotionnelle déjà marquée durant l’enfance, et qui s’est exacerbée à l’âge adulte par des traumatismes répétés.
  • être confronté à un événement de vie traumatique, où la personne se sent complètement dépassée.

Connaître les origines du trouble bipolaire permet de mieux comprendre les stratégies thérapeutiques adoptées pour cette maladie. Concernant le désordre biologique, la réponse est médicamenteuse. Pour la fragilité psychologique, la réponse est psychothérapeutique.

Troubles bipolaires : les traitements pharmacologiques qui soignent

Les médicaments agissent sur la biologie du cerveau, ce qui, par conséquent, a une influence sur le psychisme. Le trouble bipolaire est un mauvais fonctionnement des neuromédiateurs et un déséquilibre dans les fonctions de contrôle des neurotransmetteurs. Ce déséquilibre des fonctions cérébrales génère un problème de neurobiochimie dans l’organisme.

Maniaco dépressif, les traitements pharmacologiques possibles

L’objectif du traitement pharmacologique est de diminuer en intensité et en durée les épisodes maniaques et dépressifs, jusqu’à un état de stabilité du malade. Ceci pour lui permettre une meilleure qualité de vie, pour préserver ou favoriser sa santé, sa vie affective et son insertion socio-professionnelle.

Le psychiatre initie un traitement médicamenteux qu’il doit évaluer régulièrement, afin de surveiller la tolérance et l’efficacité de ce dernier sur le patient. Cela peut mettre plusieurs mois avant de trouver le bon traitement, celui qui lui convient. Chaque patient est un cas particulier, et son traitement doit être personnalisé. Il faut trouver le juste équilibre entre les bénéfices et les effets secondaires éprouvés par le malade, au risque que ce dernier n’arrête de prendre son traitement. L’alliance entre le patient bipolaire et son psychiatre est primordiale. Il faut parfois tâtonner pour élaborer un traitement adapté : ajuster le choix des molécules, la posologie, la dose. Dans certains cas, cela peut être pénible voire décourageant. En effet, durant cette recherche du bon traitement, le patient peut se sentir trop ralenti et fatigué, il peut ne ressentir aucun effet, ou pire, le traitement peut aggraver la pathologie : épisodes maniaco-dépressifs plus fréquents et plus intenses.

Le plus souvent, le patient atteint du trouble bipolaire prend plusieurs molécules. Les catégories de médicaments utilisés pour stabiliser le trouble bipolaire sont : les régulateurs d’humeur, les antidépresseurs, les traitements adjuvants. Notons qu’un psychiatre peut également préconiser de pratiquer des ECT (électro-convulso-thérapie) ou électrochocs, si la médication n’est pas (ou pas assez) efficace.

Troubles de l’humeur : les thymorégulateurs

Les trois types de molécules régulateurs sont le lithium (en première ligne), les antiépileptiques et les antipsychotiques atypiques. Le psychiatre choisira d’en prescrire un, deux, voire trois en fonction du cas : la forme clinique de la pathologie, les antécédents personnels et familiaux, l’âge et l’état physique du patient, etc.

Auparavant, les psychiatres prônaient un traitement thymorégulateur à vie. Aujourd’hui, ils préconisent un traitement sur au moins deux ans dans la mesure où il est efficace. Il est important de faire des prises de sang régulières afin de vérifier si la concentration sanguine du régulateur est juste, et s’il n’y a pas de répercussions négatives sur d’autres organes et systèmes (thyroïde, reins, système sanguin, etc.).

Les effets secondaires du lithium sont variables selon l’individu, on retrouve le plus communément : des tremblements aux extrémités des membres, une hypothyroïdie, une prise de poids, une polyuro-polydipsie (boire et uriner beaucoup), une diminution de la libido, un « amortissement » des émotions, etc.

Les effets secondaires des antiépileptiques les plus fréquents sont : une grande fatigue (asthénie), une prise de poids, une chute des cheveux, des troubles digestifs. Les effets secondaires des antipsychotiques atypiques le plus rapportés sont : des syndromes extrapyramidaux (tremblements au repos, rigidité ou hypertonie musculaire), une prise de poids, des akathisies (besoin impérieux de bouger les jambes), des troubles métaboliques de type diabète.

Troubles bipolaire: antidépresseurs ou pas?

En général, les psychiatres essaient de soigner les phases dépressives d’un trouble bipolaire sans antidépresseur. Pour une minorité de patients, l’utilisation d’antidépresseurs est bénéfique. Mais pour une grande majorité des cas, ils sont inutiles ou dangereux. En effet, pour certains les molécules d’antidépresseurs n’ont aucun effet, ni positif ni négatif. Pour d’autres, la prise d’antidépresseur déclenche une phase maniaque ou hypomaniaque, et l’arrêt les replonge immédiatement en dépression. Et enfin, le pire des cas, les antidépresseurs aggravent le trouble du patient qui se met à développer un « état mixte ».

Les traitements adjuvants pour les troubles bipolaires

Le traitement peut être complété et renforcé par des neuroleptiques ou des benzodiazépines. Ces médicaments permettent de mieux gérer l’anxiété, ils permettent aussi de mieux contrôler les délires dans le cas de trouble bipolaire de type 1. Ces molécules sont en général prescrites pour un temps limité : il s’agit d’éviter la camisole chimique.

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ECT (électro-convulso-thérapie) et électrochocs, une autre solution

Certains patients ne répondent pas au traitement médicamenteux et sont en grande souffrance lors de dépressions résistantes ou de manies résistantes. C’est alors que le psychiatre peut suggérer de pratiquer des ECT ou des électrochocs pour provoquer des crises d’épilepsie. Certains patients bipolaires trouvent un réel soulagement avec cette méthode. On constate donc un lien étroit entre l’épilepsie et le trouble de l’humeur, qu’il soit dépressif ou maniaque.

Cette méthode d’ECT ou électrochoc se pratique sous anesthésie générale. Elle consiste à provoquer une crise d’épilepsie chez un patient au moyen de courant électrique d’intensité variable sur le crâne. Cela agit visiblement sur les neurotransmetteurs du cerveau, ce qui calme l’agitation ou apaise la dépression.

La science ne peut pas expliquer à ce jour avec exactitude, ni pourquoi ni comment cela marche. Les ECT auraient une action bénéfique sur l’ensemble du cerveau : sur le fonctionnement des neurones, la synthèse des molécules (monoamines et autres) et peut-être sur le matériel génétique. Un postulat dans le milieu scientifique dit que « l’absence de preuve n’est pas preuve d’absence ». Il n’est pas rare en science qu’un traitement donne des résultats sans que l’on sache précisément pourquoi, ou encore, on peut continuer à trouver de nouvelles vertus à un médicament ou un traitement déjà existant (par exemple l’aspirine). Dans tous les cas, on constate que cette méthode d’ECT et d’électrochocs apporte de réels bienfaits à certains patients atteints de ce trouble psychiatrique.

Le risque le plus fréquent de cette méthode est l’apparition de perte de mémoire durant la période où les ECT sont pratiqués.

Bipolarité : le traitement pharmacologique peut-il suffire ?

Les médicaments ont bien évidemment leur utilité, toutefois les événements de vie du patient sont déterminants pour sa stabilité. En effet, si le patient se trouve dans un contexte de vie très éprouvant, malgré un bon traitement pharmacologique suivi et encadré de près par un bon psychiatre, des risques de rechutes sont possibles. On ne peut pas compter uniquement sur la médication.

Lorsqu’on comprend les causes et les origines de la maladie bipolaire (biologie, psychisme, environnement), on comprend qu’il va falloir agir sur ces trois dimensions pour se soigner. Pour être stable, la personne atteinte d’un trouble bipolaire doit donc agir sur les trois plans suivants :

  • sur le plan biologique : trouver et prendre le traitement pharmacologique qui convient

  • sur le plan psychique : faire un travail psychothérapeutique

  • sur le plan environnemental : pratiquer la psychoéducation et être bien entouré (proches compréhensifs, solides, présents).

Maniaco dépression: les psychothérapies appropriées

La psychothérapie influe sur le psychisme du patient, sur ses interactions relationnelles et son environnement, ce qui modifie sa biologie.

Dans une psychothérapie se crée une authentique relation entre le thérapeute et le patient. Cette relation met en œuvre un ensemble de choses caractérisant les modalités relationnelles du patient avec son entourage habituel. Il existe différentes sortes de thérapies : la psychothérapie de soutien, la psychothérapie cognitive et comportementale, la psychothérapie analytique, la psychoéducation.

La psychothérapie de soutien

Elle est pratiquée par un psychothérapeute : psychiatre, psychologue clinicien, psychanalyste. L’objectif est de soutenir le patient sur la durée (en moyenne deux ans) qu’il conviendra, et à minima jusqu’à avoir retrouvé une stabilité. Il est recommandé de la démarrer le plus tôt possible. C’est un temps de liberté de parole, le patient est écouté et peut exprimer encore et encore ses souffrances. Le psychothérapeute a plusieurs « missions » :

  • aider le patient à cheminer dans l’acceptation de sa maladie

  • aider le patient à faire le tri dans ses différents vécus

  • aider le patient à renouer avec sa personnalité profonde, identifier ses comportements liés à sa pathologie et ceux liés à sa personnalité

  • aider à amortir les sentiments de désespoir et de découragement

  • aider à verbaliser ses idées noires et à exprimer ses pensées suicidaires

La thérapie comportementale et cognitive (TCC)

Les comportements humains sont déterminés par des cognitions (contenus de pensées) qui surgissent de manière automatique. Ces cognitions se sont forgées et apprises au cours de l’éducation reçue. Lorsqu’une situation se présente, nos cognitions (pensées apprises et intégrées dans les profondeurs de notre psychisme) déclenchent nos comportements et nos réactions émotionnelles de façon automatique. Lorsqu’une personne est atteinte de troubles psychiques, elle a des distorsions cognitives, ses pensées face à une situation sont faussées, non adaptées à la réalité, ce qui provoque des vécus émotionnels pathologiques et des comportements pathologiques.

L’objectif de la TCC est de « désapprendre » ces cognitions distordues, de les faire disparaître, afin d’« effacer » les vécus émotionnels et les comportements pathologiques. Puis, il s’agit de produire et d’apprendre des pensées alternatives acceptables et cohérentes. Le thérapeute en TCC accompagne le patient dans la découverte de son trouble et des mécanismes qui le déterminent.

Lors des phases dépressives ou de rémission, la personne atteinte de la maladie bipolaire peut avoir une propension très marquée à la rumination d’idées obsédantes, aux phobies, à une anxiété permanente. Les pensées obsessionnelles et l’anxiété sont souvent liées à une très faible estime de soi, à un mal-être dans les relations sociales. De ce fait, les bipolaires ont tendance à l’auto-dévalorisation, et sont enclins à se désociabiliser peu à peu. Dans ce genre de cas, la TCC est vivement recommandée.

La TCC est une thérapie brève. Faire plusieurs séquences est possible en fonction de l’évolution du patient. Il est vraiment préférable que le patient soit en phase de rémission pour pouvoir profiter pleinement de cette aide.

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La thérapie d’inspiration analytique

Lors d’une thérapie d’inspiration analytique, le patient n’est pas allongé et le thérapeute intervient. On est sur un travail dans les profondeurs, basé sur l’inconscient. La vie psychique de tout un chacun est principalement déterminée par l’inconscient. L’objectif de la thérapie analytique est de permettre au patient de mieux comprendre pourquoi il intègre telle situation de telle manière, pourquoi il a telle cognition dans telle circonstance. Il s’agit donc de lui permettre de retrouver les clés de son histoire pour ne plus être prisonnier de certains schémas. Il s’agit de tenter d’établir des liens entre le présent et le passé, de comprendre comment telle situation présente fait écho à certains événements passés de son histoire.

Certaines prises de conscience participent à la modification sur le psychisme et sur les comportements.

Troubles bipolaires : les groupes de psychoéducation

La psychoéducation est un espace d’échange entre les patients et les soignants (psychiatre, infirmier), un groupe de parole. C’est un complément d’un traitement médicamenteux et thérapeutique. L’objectif de la psychoéducation est d’engranger de l’information sur la maladie bipolaire, de trouver du soutien, de partager des ressentis et des expériences d’autres patients. C’est comprendre et identifier la maladie, et « sa maladie » en particulier, en décortiquant tous les aspects, afin de mieux vivre avec. La psychoéducation apporte un grand nombre de bénéfices, elle permet au bipolaire  :

  • d’acquérir toutes les connaissances générales sur le trouble bipolaire

  • de connaître précisément la forme clinique de sa propre maladie

  • d’identifier les symptômes précurseurs de ses phases hautes et ses phases basses

  • de savoir comment réagir lorsque ces signaux d’alarme apparaissent (manie, dépression)

  • de comprendre et d’identifier les modalités de ses rechutes

  • d’identifier les situations qui le fragilisent et les facteurs déclencheurs

  • de repérer les réactions qu’il développait face à sa maladie, ce qui est symptôme ou non

  • de comprendre comment ses réactions influencent ses troubles

  • d’échanger avec les soignants et les autres patients

Psychoéducation, les ateliers

Les patients peuvent également accéder à des ateliers sur les traitements médicamenteux, afin de comprendre leur action sur le corps, leurs bienfaits, leurs inconvénients. L’atelier est animé par un pharmacien et un psychiatre. Le but est que les patients comprennent les interactions dangereuses entre certains médicaments. C’est un patrimoine informationnel permettant aux patients de « tenir bon » lorsqu’ils sentent la rechute venir et qu’ils n’ont pas la possibilité immédiate de contacter un soignant. En cas d’urgence, cela leur permet une « automédication éclairée ». Ce n’est pas nouveau, ce type d’atelier existe aussi pour les diabétiques, les asthmatiques.

Les bipolaires ont la possibilité d’accéder à des ateliers avec une assistante sociale, notamment pour connaître les différentes mesures de protection juridique (sauvegarde de justice, curatelle simple, curatelle renforcée, tutelle). Cela fait partie des solutions envisagées pour les patients qui font des dépenses inconsidérées durant leurs phases maniaques, afin de leur éviter des difficultés financières. Cela peut être également adapté aux patients qui font des épisodes dépressifs lourds à répétition, et sont alors dans l’incapacité de gérer factures et démarches administratives en temps voulu. Cela peut aussi être envisagé pour les patients atteints de trouble bipolaire de type 1, et qui, s’ils sont en délire paranoïaque, peuvent refuser d’être soignés.

Dans cet atelier, les patients sont également informés sur les différents types de congés : arrêt de travail simple, congé longue maladie, congé longue durée. On peut aussi leur donner des informations sur le statut de travailleur handicapé : les possibilités de reconnaissance du handicap, les possibilités d’allocation.

Les bipolaires peuvent de surcroît accéder à divers ateliers créatifs pour stimuler leur psychisme parfois plus ou moins éteint selon la lourdeur du traitement. Sont proposés des ateliers sportifs pour se réconcilier avec leur corps (prise de poids, négligence physique), et se rapprocher d’une hygiène de vie passée. Les ateliers créatifs et sportifs sont conduits par des psychiatres, des ergothérapeutes et professeurs de gymnastique.

Hygiène de vie : enjeu important pour contrer les fluctuations d’humeur

L’hygiène de vie tient une place majeure parmi les facteurs qui influencent l’évolution de la maladie. En effet, on constate que les patients qui se stabilisent beaucoup plus facilement sont attentifs à avoir une bonne hygiène de vie, à respecter des rituels :

  • sommeil correct (durée, qualité, régularité)

  • bonnes règles hygiéno-diététique (rythme des repas, qualité nutritionnelle)

  • absence de consommation de substances toxiques

  • évitement des excitants (thé, café)

  • pratique d’activités socialisantes

  • pratique d’une activité physique régulière

Le sommeil est un point de repère fondamental dans cette maladie. Avoir un sommeil perturbé, c’est soit un symptôme précurseur d’une phase maniaque ou dépressive, soit un facteur déclencheur d’un épisode maniaco-dépressif.

Avoir une bonne hygiène de vie permet de favoriser un équilibre émotionnel, ce qui est primordial. Car toute situation mobilisante sur le plan émotionnel peut fragiliser le patient, et donc peut induire une amorce de décompensation (rupture des mécanismes régulateurs).

La psychoéducation, l’information pour les proches aussi

Le soutien des proches favorise l’équilibre émotionnel du patient. Il ne se substitue pas à l’aide apportée par le personnel soignant, car les proches ont leurs propres émotions et leurs propres limites, d’autre part la relation de proximité qu’ils entretiennent avec le patient peut être passionnelle avec certains enjeux affectifs.

Face à cette maladie, les proches réagissent différemment. Par peur ou manque d’information, certains proches sont rejetants, d’autres sont culpabilisants, d’autres encore sont dans le déni total de la maladie. Le patient ne vit alors pas dans un climat idéalement soutenant.

A l’opposé, certains proches peuvent être très « soutenant ». Ils « acceptent » pleinement la maladie, ils se documentent et tentent de comprendre. Ils peuvent trouver des informations par eux-même ou par le biais de la psychoéducation, qui comme nous l’avons vu est une mine d’informations. Par amour, ils offrent leur soutien et leur affection dans les moments les plus difficiles, même s’ils peuvent parfois aussi « craquer ».

La psychoéducation aide le patient à prendre soin de lui. Il est informé et acteur de ses soins. Il apprend à se respecter lui-même, à travailler sur ses fragilités, à se réguler. Peu à peu, il parvient à accepter sa maladie, et les conséquences professionnelles et sociales résultant de sa pathologie.

Le trouble bipolaire est une maladie avec laquelle on peut évoluer de façon relativement apaisée, tout dépend des mesures mises en place pour atteindre une stabilité. Ces mesures passent par l’acceptation de la maladie, associée au bon traitement, à une bonne hygiène de vie, et au soutien du personnel soignant et des proches. Ce sont autant de facteurs permettant à la personne atteinte d’un trouble bipolaire d’entretenir dans sa vie un climat de sérénité, de confiance et de dialogue, soit la stabilité.

Le traitement à privilégier pour la bipolarité repose nécessairement sur plusieurs axes. Le traitement pharmacologique permet de retrouver un équilibre biologique. Il s’y ajoute la psychoéducation pour ses précieuses informations et le soutien de groupe. Enfin, il y a la ou les psychothérapie(s) pour travailler sur l’expression des ressentis, fragilités, traumatismes, etc.

Dans le cadre des vécus traumatiques, la méthode de reprogrammation mentale (notamment l’hypnose) peut être efficace et apporter un soulagement. Ces méthodes peuvent être complémentaires mais ne remplacent pas l’ensemble du traitement.

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FAQ

Peut-on avoir une relation amoureuse avec une personne bipolaire?

Oui. Pour que cela fonctionne, il est indispensable de se renseigner et de comprendre cette maladie. Savoir faire preuve d’amour, de compassion et de patience est essentiel. Il faut maintenir une relation stable et mettre en avant une communication ouverte et positive pour exprimer ses émotions et ses sentiments

Comment aider un bipolaire en phase dépressive?

Garder le sourire et être chaleureux est primordial. Sachez l’encourager en lui faisant remarquer ses progrès et les choses positives. Il est important de lui montrer votre compréhension de son état en lui prêtant une écoute active et en accueillant ses sentiments négatifs. Enfin, il faut montrer votre soutien en étant présent(e) et en lui demandant s’il y a quelque chose que vous pouvez faire pour l’aider.

Comment aider un bipolaire en phase maniaque ou hypomaniaque?

Il est important de rester calme et de faire attention au ton et à la forme de vos propos. Préférez communiquer avec le bipolaire sous forme de questions, et évitez les injonctions, les ordres, les remarques brutales. L’objectif est de soulever des questions, afin qu’il s’interroge et réalise qu’il a des symptômes précurseurs d’une phase maniaque ou hypomaniaque.

Comment favoriser la stabilité d’une personne atteinte de bipolarité?

Il est nécessaire d’adopter une bonne hygiène de vie et surtout régulière (sommeil, alimentation, activité physique). Il convient de bien suivre son traitement et sa thérapie. Il est recommandé de maintenir des liens sociaux, mais d’éviter les situations ou les personnes susceptibles de déclencher un épisode dépressif ou maniaque.

Faut-il avoir peur de fréquenter une personne bipolaire?

Non, cela serait réduire une personne à son trouble, alors qu’il existe un être humain derrière cette maladie. Dans la compréhension et l’acceptation de sa maladie, le bipolaire aura développé ses astuces pour mener une vie stable, être relativement apaisé, et en capacité de mieux gérer ses émotions et ses humeurs.